Accompagnant les entreprises dans leur transformation, c’est tout naturellement que le sujet de la culture de la data me passionne. Mais même avec la meilleure stratégie d’analyse et les meilleurs outils, je suis intimement convaincu que les efforts de toute organisation seront vains sans une culture de la donnée.

Rappelons les faits

Sans donnée pas d’informatique ! une évidence me direz-vous puisque les technologies de l’information sont par définition basées sur le traitement des données. Alors qu’est-ce qui fait que les données sont subitement sur le devant de la scène, comme si nous découvrions la DATA ?

La donnée est restée jusqu’ici souvent enfouie derrière les outils, au sein des bases de données, comme une entité abstraite, rendue visible uniquement sur les écrans des applications. Seuls les outils de reporting ou de Business Intelligence (BI) répondaient aux besoins de compréhension et d’analyse en fournissant une photo de la situation.

Or les puissances de calcul et les technologies évoluant, les besoins ont également évolué. Le besoin d’immédiateté, d’anticipation, d’automatisation des transactions, rendent les données fondamentalement critiques dans la chaîne de valeur. De plus, les nouveaux business modèles numériques sont principalement basés sur l’exploitation intelligente des données.

La donnée a donc une valeur économique !! nous y sommes. Et voilà pourquoi, cette entité qui vivait dans l’ombre, est devenue la star, déchaînant passions et rêves d’entrepreneurs vers un nouvel El Dorado.

Selon le résultat d’une enquête récente menée par BI Survey :

  • 67% des entreprises accordent une valeur importante de l’information dans leur processus de prise de décision
  • 61% des entreprises considèrent les données comme des actifs à part entière
  • 54% des entreprises affirment générer des revenus additionnels et de nouvelles opportunités business grâce au bon traitement des données
  • 57% des entreprises confirment faire de l’analyse prédictive afin d’anticiper des événement et tendances liés à leur business

Faisons un petit tour sur le terrain !

  • Il y a quelques semaines, le dirigeant d’une ETI me confie, désespéré, que malgré tous ses efforts d’automatisation, des centaines de feuilles de calcul, probablement truffées d’erreurs, sont transmises de personne à personne, mises à jour plus de fois et sur plus de versions, qu’il n’est plus possible de les suivre.
  • Il y a quatre ans, un de nos clients DSI avait mené tambour battant le déploiement d’un MDM (Master Data Management) afin de structurer et assurer une bonne gouvernance des données clients. Il envisage aujourd’hui de revoir complètement revoir l’environnement du fait d’une complexité d’intégration et de maintenance, une vision trop technocentrée, des coûts croissants, des dirigeants qui s’exclament sur le gaspillage de l’argent pour faire fonctionner « cette plateforme de données que personne n’utilise ».
  • L’intelligence collective reste encore dans la plupart des entreprises, la principale méthode de prise de décision. Or, il subsiste une bonne partie de subjectivité dans cette approche. En effet, le nombre de paramètres intégrables par le groupe reste malgré tout limité et le collectif est soumis à la dynamique d’influence entre les individus. Ce qui nécessite multiples réunions et ateliers avant de converger vers une décision ou des actions.

Le point commun de ces trois situations ?

Un manque de culture de la Donnée.

Trop focalisées sur les processus, l’organisation, ou les outils, ces entreprises n’avaient pas suffisamment conscience de la valeur de données à leur disposition et ne savaient pas comment les exploiter pour en tirer le maximum.

Les entreprises, quelle que soit leur taille, doivent tôt ou tard apprendre à piloter et opérer en apprivoisant les données.

Alors là, je vous entends dire : culture des données ! data-driven ! bla-bla-bla ! On comprend bien que les données apportent de la précision, une vision plus exhaustive, de l’objectivité, etc…

C’est bien beau mais comment établir une culture de la donnée ?

La réponse n’est évidemment pas simple, ni unique.

Quoi qu’il en soit, ma première conviction est que pour installer une culture de la donnée, il faut commencer par briser le stéréotype encore trop répandu qui dit « nous avons toujours fait comme ça », plus facile à dire qu’à faire croyez-moi !

Ensuite, cela signifie qu’il faut surmonter la résistance aux données qui empêche les entreprises d’exploiter au mieux leurs capacités afin de se créer de nouvelles opportunités.

Certes, ce n’est pas simple, c’est un changement complet de mentalité, de modes de fonctionnement, et de réflexes, mais le jeu en vaut la chandelle.

Les données offrent des possibilités incroyables – la possibilité de rationaliser les opérations, d’optimiser les conditions, d’augmenter le chiffre d’affaires, de réduire les coûts, de prendre des risques, de mettre en œuvre des changements… la liste est longue.

Mais cette opportunité n’existe que si tout le monde est à bord. Tout le monde doit non seulement connaître l’impact que peuvent avoir les données, mais aussi croire de tout cœur à la nécessité de les exploiter activement.

Créer une culture axée sur les données consiste à associer ou remplacer le sentiment instinctif par des décisions fondées sur des faits dérivés des données. L’objectif principal est de permettre à tous les employés d’utiliser activement les données pour améliorer leur travail quotidien et d’utiliser pleinement le potentiel d’une entreprise en prenant des décisions plus fructueuses, des initiatives plus efficaces et des avantages concurrentiels plus frappants.

C’est à cette condition que l’on pourra parler véritablement d’une culture des données.

Les principaux freins qui me sont avancés par les CIO et CDO :

  • Le manque de vision de la direction
  • Le manque de compétences en interne
  • Le manque de confiance dans la qualité des données
  • Le manque d’outil de démocratisation des données auprès des métiers (trop techniques)

 Les 4 conditions absolument nécessaires

En pratique, installer une culture des données demande du temps et de l’engagement de tous, à commencer par la Direction. Mettre en place une culture de la donnée ne se fait pas du jour au lendemain. De ce fait, je préconise pour ma part, plutôt une approche par petits pas successifs, tel un processus :

  • Maîtriser la qualité des données

La première étape consiste à traiter et à améliorer la qualité des données. Des règles de gouvernance, associée à des outils de nettoyage permettent d’avoir des résultats significatifs très rapidement. Également, pour les plus téméraires de nouvelles approches telles que l’apprentissage machine et l’exploration de données sont une option courante pour le nettoyage et la structuration des données. Pour cette étape, des consultants externes peuvent aider à trouver les bons outils et méthodes. Sans données fiables, toute tentative d’analyse peut conduire à prendre des décisions infructueuses.

  • Une unique source de Vérité

Pour installer une culture de données réussie est de s’assurer que tout le monde dans votre organisation utilise les mêmes données. L’impact de cette démarche est énorme, car avec une source unique de vérité, vous évitez des conflits et discussions inutiles qui surviennent lorsqu’on tire des ensembles de données similaires, mais issus de logiciels différents. Ce qui permet également un meilleur alignement entre les équipes. Comme nous le savons, gagner du temps, c’est gagner de l’argent.

  • Le pouvoir aux collaborateurs

Comme je l’ai précisé plus haut, la culture des données suppose un usage au quotidien et au plus proche du terrain. Les entreprises doivent s’assurer que les données et les informations sont faciles et rapides à trouver. Ceci est particulièrement important afin de donner aux employés une plus grande autonomie et un accès facilité aux données, au lieu de les restreindre. Ce qui permet à tous et à tous les niveaux de réussir dans son travail – et pas seulement aux cadres ou managers privilégiés – de prendre des décisions en utilisant les données.

Un accès aux données par l’ensemble du personnel au quotidien décourage l’opinion de celui qui « crie le plus fort » et donne du pouvoir à l’expérience, aux succès, échecs, afin de guider les choix quotidiens de l’entreprise. Des outils comme Alteryx permettent facilient désormais une prise en main rapide des données par des non technophiles, ramenant la datascience à la portée du plus grand nombre.

  • Des équipes compétentes

Une culture des données est une culture dans laquelle chacun a accès aux données certes, mais sait surtout comment interagir avec elles, les travailler selon ses besoins, les interpréter pour en tirer les meilleurs enseignements. Cela passe indéniablement par un accompagnement et de la formation. En ayant des équipes formées et capables de maîtriser les données, vous permettez à tous les membres de prendre de bonnes décisions. Chaque membre de votre équipe sera ainsi équipé pour participer activement à des analyses et des prises de décision robustes. L’investissement vaut bien « le coût » 🙂 !

 Finalement

Mettre en place une culture de la donnée c’est donc engager l’entreprise dans un processus d’apprentissage de l’usage des données, qui s’affinera avec le temps. Pour faire un parallèle, n’est-ce pas le principe même du Machine Learning ? Alors dans ce cas, en poursuivant l’analogie, le processus de déploiement d’une culture de la data pourrait être vu comme un processus d’auto-apprentissage tel un algorithme de Machine Learning ?

Ce qui voudrait dire que pour installer efficacement et durablement une culture de la donnée, l’organisation devrait apprendre à apprendre. Mais ceci est un autre débat….

Yves MICHEL – Directeur Inovency

yves.michel@inovency.fr

 

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